Fantasmes japonais
En Occident, il y a des normes sur ce qui est acceptable ou non qui n’existent pas au Japon, car il s’agit essentiellement de normes religieuses. Ce qui est considéré comme « bestialité » ou « pédophilie » en Occident et n’est pas toléré, même en imagination, est toléré au Japon tant que la personne ne le met pas en pratique et ne porte pas atteinte à la société. Les fantasmes sont ainsi souvent relayés par les manga, les jeux vidéo ou les animes.
Certains fantasmes sont propres au Japon. Les love dolls sont des poupées de silicone à grandeur humaine, à l’aspect hyper-réaliste et à la peau douce, valant entre 3 700 et 5 000 euros. Au Japon, 30% des hommes célibataires de plus de 30 ans resteront célibataires. Il leur reste donc ces substituts dociles à l’allure enfantine qu’ils habillent et mettent en scène pour leur donner une illusion de vie.
Le fétichisme des couches, contrairement à l’Occident, est assez répandu au Japon. De nombreuses vidéos et revues montrent des personnes se faisant langer. C’est la vulnérabilité et le côté infantile qui excitent.
D’autres fantasmes, répandus dans le monde, sont ici perçus différemment. Le sado-masochisme et le bondage sont assez courants : on peut lire librement, même dans le métro, des revues sur ces sujets. Le bondage a ses origines au Japon dans le shibari, « l’art d’attacher ». Les techniques sont si complexes qu’elles demandent plusieurs années d’apprentissage. Les artistes japonais se font appeler senseï et gagnent leur vie en ligotant des femmes : invités comme des stars par les clubs ou les journaux, ils participent à des démonstrations, des séances photo et des tournages de films pornos… La fonction principale du shibari est d’ordre esthétique, même si les japonais, dans leur fantasme de domination, raffolent de ces filles attachées et réduites à une impuissance toute symbolique.
Le lolicon, ou attirance sexuelle pour les jeunes filles, atteint des proportions importantes dans l’univers érotique japonais. Les fureshu gyaru (« fresh girl ») font recette : ces midinettes mentholées séduisent plus les hommes que les femmes d’âge mûr. Et les médias perpétuent l’image de la femme-enfant à travers divers stéréotypes : nymphettes en maillot de bain, idoles au regard angélique…
La mode des travestis tient une part importante dans la société japonaise. Dans certains bars, les hôtes sont des femmes travesties en hommes, les onabe : la clientèle y est surtout féminine et vient pour être câlinées par « ces hommes qui les comprennent si bien ». Dans d’autres, les hôtesses sont des hommes travestis en femme : cela fait partie de la culture. Autrefois, le théâtre était interdit aux femmes, et les hommes tenaient les rôles féminins. Aujourd’hui, on assiste à une nouvelle mode : les okama, ou « garçons-paons », sont des jeunes hommes efféminés, pas toujours homosexuels, qui cultivent leur côté féminin en portant jupes longues et attributs féminins, et en dépensant des fortunes en cosmétiques et vêtements. A l’opposé, les oyaji girls (filles machos) rejettent les attributs de la féminité pour envahir les lieux et les activités traditionnellement réservés aux hommes : bars, mah-jong, courses…
Extrait de l’agenda Pika éditions 2006